Lancement à N’Djamena d’un projet régional pour valoriser la transhumance

Lancement à N’Djamena d’un projet régional pour valoriser la transhumance

Un projet régional lancé à N’Djamena pour valoriser la transhumance en Afrique centrale

Le projet « Paix, Transhumance et Développement de l’Économie Pastorale autour du Lac Tchad (PETRADEP) » a été officiellement lancé à l’hôtel Radisson Blu. Cette cérémonie d’ouverture a réuni une multitude d’acteurs institutionnels, techniques et diplomatiques, soulignant l’importance stratégique de cette initiative pour la stabilité régionale.

Au Tchad et dans plusieurs pays voisins Cameroun, Nigeria, Niger la transhumance est une activité qui implique diverses communautés. Pratique pastorale très ancienne, elle est un déplacement saisonnier de troupeaux d’animaux (bovins, ovins, caprins, chevaux) entre des pâturages opportuns ; elle est souvent accompagnée du déplacement des bergers et de leurs familles. Ce qui a des implications économiques, sociales et culturelles très importantes.

Dans le bassin du Lac Tchad, elle s’inscrit dans un équilibre fragile avec les pratiques agricoles sédentaires et la préservation des ressources naturelles. Elle façonne les modes de vie, structure les économies locales et tisse des liens de solidarité entre communautés frontalières. Cependant, les mutations contemporaines tant naturelles que socio-politiques bouleversent cet écosystème ancestral. L’augmentation des tensions foncières, la raréfaction des pâturages, la persistance de maladies animales transfrontalières, ou encore les déplacements forcés liés à l’insécurité, menacent les équilibres historiques de cohabitation entre éleveurs et agriculteurs.

PETRADEP est une réponse régionale coordonnée

C’est face à toutes ces problématiques que pose cette activité, qu’est né le projet PETRADEP. Il se positionne comme une réponse régionale coordonnée. Financé par l’Union européenne, le BMZ, il est mis en œuvre par la GIZ, ce projet d’envergure ambitionne de prévenir les crises et de renforcer la résilience des ménages vivant de la transhumance dans la région du Lac Tchad. Il s’étend sur la période 2025-2028 et couvre un corridor transfrontalier stratégique reliant le Tchad, le Cameroun, le Nigeria et le Niger. En misant sur la complémentarité des approches nationales et la synergie entre les acteurs locaux et régionaux, PETRADEP incarne une vision pragmatique et inclusive du développement pastoral.

La cérémonie de lancement dudit projet a réuni un aréopage d’acteurs institutionnels, techniques, diplomatiques, soulignant ainsi l’importance stratégique de cette initiative pour la stabilité régionale.   Parmi les personnalités présentes figuraient le chargé d’affaires de l’ambassade fédéral d’Allemagne, Samir Felich, la chargée d’affaires de la délégation de l’Union européenne, Sona Jarosova, le Secrétaire exécutif de la Commission du Bassin du Lac Tchad (CBLT), Mamman Nuhu ainsi que de nombreuses autorités tchadiennes. Tous ont unanimement salué un projet porteur d’espoir pour des millions de personnes vivant dans cette région marquée par l’insécurité, la pression démographique et les chocs climatiques. Il faut noter parmi les allocutions celle du Secrétaire exécutif de la CBLT.

Ayant eu l’insigne honneur d’ouvrir les travaux, Mamman Nuhu a souligné avec force que ce projet « s’inscrit dans une dynamique régionale de stabilisation et de développement durable autour du bassin du Lac Tchad ». Une zone stratégique, à la fois carrefour économique et mosaïque culturelle, où se joue une part importante de la sécurité alimentaire et de la paix dans l’ensemble du Sahel. Il a rappelé que la durabilité des actions engagées dépendra de l’implication active des populations bénéficiaires, mais également de la continuité des engagements politiques.

Dans son allocution empreinte d’espoir le chargé d’affaires de la délégation de l’ambassade fédéral d’Allemagne, a rappelé que ce projet s’insère dans une dynamique régionale de stabilisation et de développement durable autour du bassin du Lac Tchad. Il a souligné « l’importance de cette région comme carrefour vital pour la sécurité alimentaire, la paix et la résilience climatique au Sahel ». Son propos a résonné comme un appel à l’action collective, soulignant que la stabilité du bassin du Lac Tchad passe par une reconnaissance pleine et entière du rôle des pasteurs, souvent marginalisés, mais porteurs de savoirs, de traditions et de solutions. En ce qui le concerne, PETRADEP est une pierre angulaire dans l’édifice d’un avenir plus juste et plus harmonieux dans l’espace sahélien.

Processus ambitieux au service d’une région en quête de stabilité et de reconnaissance 

Cinq grands résultats sont attendus à l’issue de sa mise en œuvre. D’abord, la gestion de conflits, cela implique la mise en place de mécanismes de concertation entre éleveurs, agriculteurs, autorités locales, afin de prévenir les conflits liés à l’usage des ressources naturelles. Une gouvernance pacifique et inclusive de la mobilité transfrontalière du bétail. Ensuite, une amélioration de la protection sanitaire des ménages pasteurs et de leurs troupeaux face aux maladies animales et zoonotiques, qui constituent un frein majeur à la mobilité et à la compétitivité de l’élevage transhumant.

Par ailleurs, PETRADEP vise à renforcer les capacités économiques des communautés pastorales et agropastorales, en soutenant notamment l’accès aux marchés, la transformation des produits laitiers et la diversification des revenus. Enfin, le cinquième objectif du projet est de favoriser une meilleure coordination des actions menées dans le bassin du Lac Tchad, en assurant la diffusion des bonnes pratiques et des leçons apprises auprès de l’ensemble des acteurs concernés.

A plus d’un titre, PETRADEP marque le point de départ d’un processus ambitieux, au service d’une région en quête de stabilité et de reconnaissance. Une région trop souvent réduite à ses crises, mais qui recèle d’immenses potentialités humaines, culturelles et économiques. En reconnectant les éleveurs à leurs parcours, les territoires à leurs vocations, les peuples à leur histoire, ce projet redonne souffle à un modèle de vie trop longtemps fragilisé.

Pour rappel, en avril dernier, le lancement régional du projet avait été effectué à Yola au Nigeria. Ce fut le point de départ pour le changement de paradigme, où les communautés pastorales ne sont plus perçues comme des problèmes à gérer, mais comme des partenaires à valoriser, il a depuis sa conception en juillet 2023, marqué le terrain par des interventions ciblées, un dialogue communautaire renforcé et des actions de proximité dans les zones sensibles.

En plaçant la transhumance au cœur de son approche, le projet redonne ses lettres de noblesse à un mode de vie souvent stigmatisé, mais profondément adapté aux réalités du Sahel. Il invite les États, les partenaires techniques, les communautés et les acteurs de la société civile à repenser ensemble l’avenir du bassin du Lac Tchad, non pas dans l’urgence de la réponse aux crises, mais dans la construction patiente d’une coexistence harmonieuse.

                                                                         

Saboura DOUNIA


 

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