Libye : un migrant éthiopien meurt devant le centre du HCR à Tripoli

Un Éthiopien de 21 ans est mort mardi devant les locaux du Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés à Tripoli. Selon les premières informations, le jeune exilé avait contracté la tuberculose et souffrait de malnutrition en raison de ses conditions de vie en Libye, et de son séjour en centre de détention.
Il s’appelait Mujahid Hajji. Mardi 5 septembre, cet Éthiopien de 21 ans est mort sur un bout de trottoir de Tripoli, devant les locaux libyens du Haut-commissariat des Nations unies aux réfugiés (HCR). L’annonce a été faite le jour même sur X (ex-Twitter) par une vidéo de quelques secondes diffusée sur le compte Refugees in Libya, qui documente le quotidien des migrants dans le pays. Sur les images, on distingue un homme à terre entouré de plusieurs personnes. Dès le lendemain, l’information a été confirmée par l’agence onusienne sur les réseaux sociaux.
Mujahid Hajji est décédé en pleine journée devant ses amis et une centaine de migrants, qui campent depuis deux mois devant le HCR pour réclamer leur évacuation de Libye. Lui aussi avait posé ses affaires près des bureaux de l’organisation, en espérant être pris en charge par l’ONU.
Le parcours de ce jeune Éthiopien ressemble à celui de milliers d’autres bloqués depuis des années dans l’enfer libyen. Mujahid Hajji est arrivé fin 2021 dans le pays et a rapidement rejoint le sit-in devant le HCR à Tripoli, indique le compte Refugees in Libya.
À cette époque déjà, des centaines d’exilés ont fait le siège pendant des semaines pour demander leur réinstallation dans un État tiers. Mais au bout de trois mois de lutte, ils ont été violemment expulsés en janvier 2022 par les autorités libyennes en envoyés en prison. Certains comme Mujahid Hajji ont réussi à s’enfuir et à échapper à la détention. Le jeune homme avait « trouvé refuge dans la communauté libyenne », précise Refugees in Libya.
« L’histoire de Mujahid n’est qu’une parmi tant d’autres »
En mars 2023, lassé d’attendre une protection du HCR, il prend la mer dans l’espoir de rejoindre l’Italie. Mais il est intercepté par les garde-côtes libyens et envoyé à la prison d’Abu Issa, dans la ville côtière de Zaouia, à l’ouest du pays. « Au cours de sa détention, il a enduré de graves tortures, et des privations de produits de première nécessité tels que la nourriture, l’eau et les soins médicaux », signale Refugees in Libya. Ces conditions de détention très dures ont provoqué une grave malnutrition. Le jeune homme a aussi contracté la tuberculose en prison.
An update that dismisses the lies of the @UNHCRLibya (see their report https://t.co/BAdnHhJ5Rz) and a correction about the nationality of the deceased as we presumed him to be Eritrean.
Mujahid Hajji, 21 from Oromo, Ethiopia, arrived in Libya in late 2021 and quickly joined… pic.twitter.com/FS5YvBFCjU
— Refugees In Libya (@RefugeesinLibya) September 7, 2023
En 2021, Amnesty international a publié un rapport sur les conditions de vie dans sept centres de détention, gérés par les autorités libyennes, dont celui d’Abu Issa. « Coups, violences sexuelles, extorsion de rançons, travail forcé » sont le quotidien des migrants enfermés en Libye. À Abu Issa, « les détenu.e.s ont raconté avoir atteint un état de famine faute de nourriture suffisante », avait assuré l’ONG. Dans les prisons du pays, nombreux sont également ceux qui souffrent de tuberculose. En août dernier, une femme originaire de Somalie serait décédée de cette même maladie dans le centre d’Abu Salim, à Tripoli.
Mujahid Hajji a passé cinq mois à Abu Issa. Son état s’est tellement détérioré qu’il a été jeté à la rue après sa libération du centre, toujours selon Refugees in Libya. Affaibli, l’Éthiopien a tenté plusieurs fois de contacter le HCR pour bénéficier de soins. « Après des heures d’attente pour une assistance médicale, Mujahid a succombé à sa maladie ».
Refugees in Libya accuse l’ONU de ne pas être intervenu pour porter secours à cet homme. De son côté, le HCR s’est dit sur X (ex-Twitter) « attristé » par la mort du jeune Éthiopien « amené au bureau par ses amis ». Selon l’organisation, « le HCR a tenté de fournir une aide médicale mais malheureusement il est décédé ». Des propos rejetés par Refugees in Libya : « L’histoire de Mujahid n’est qu’une parmi tant d’autres de migrants et de réfugiés qui souffrent en Libye. Des institutions comme le HCR, chargé d’aider, de protéger et d’abriter des individus comme Mujahid, ont échoué dans leur mandat ».
C-NDC