Analyse des stratégies de communication de campagne – Présidentielles 2025

Meetings surchauffés, codes vestimentaires uniformisés, discours ritualisés autour des efforts d’un leader idéalisé… Au RHDP, la campagne se joue sur le registre du spectaculaire. La stratégie de communication du plus grand parti politique en lice pour les élections présidentielles de 2025 en Côte d’Ivoire repose donc sur des mécanismes d’influence puissants, fondés sur la répétition, la scénarisation et la stimulation émotionnelle.

Historiquement, le RHDP a su construire une communication de masse hautement émotionnelle, reposant sur des mécanismes proches de ce que l’on pourrait qualifier d’hypnose politique.
Aujourd’hui encore, le discours du parti s’appuie sur un bilan valorisé de quinze années de gouvernance, autour de trois piliers récurrents que sont la paix, la stabilité et le développement.
Ces valeurs, répétées à l’envi lors des rassemblements dans les discours, les visuels et les chansons de campagne, sont Institutionnalisées au point de supplanter le débat rationnel.
De ce fait, elles ancrent dans la conscience collective une conviction émotionnelle durable, presque instinctive pour ses partisans.
En exemple, lors d’un meeting tenu dans la région de la Mé son fief politique, l’ancien Premier ministre Patrick Achi a livré un discours mobilisateur en faveur du président Alassane Ouattara.
Il a appelé à lui accorder un nouveau mandat, s’appuyant sur les réalisations concrètes dans les régions de la Mé et de l’Agnéby-Tiassa :
« Près de 200 milliards de francs CFA ont été investis dans nos régions. Les œuvres de notre candidat parlent d’elles-mêmes. C’est un produit facile à vendre », a-t-il déclaré, sous les ovations d’une foule acquise à sa cause.
Au niveau du leadership, le RHDP a l’art de la personnification du pouvoir.
En effet, il n’est pas exagéré de dire que le parti des houphouetistes sacralise son principal chef.
Le président-candidat Alassane Ouattara est présenté comme une figure quasi mythique : garant de la prospérité et symbole de la stabilité retrouvée, mais surtout père de la grande Nation naissante.
Là aussi, la dimension affective du rapport au leader repose sur une bonne maitrise des canaux de communication, notamment au sein des communautés, dans les médias traditionnels et autres plateformes numériques.
Ainsi, le parti maintient une présence constante dans la conscience collective, entre valorisation du bilan et personnalisation du pouvoir.
Il convient de noter également que la cohérence visuelle de la campagne renforce cette force de persuasion : les couleurs, slogans, chants et affiches sont harmonisés sur tous les supports.
Chaque élément – du décor de scène aux tenues du public – répond à une logique d’unité symbolique.
Lors des rassemblements, tout est brandé aux couleurs et au slogan du parti. Même les tee-shirts et casquettes distribués aux jeunes militants semblent flambant neufs, comme pour souligner le caractère exceptionnel de chaque rencontre. Et cette mise en scène du collectif suscite émotion et transe politique.
Presqu’omniprésent pendant cette période de campagne sur toutes les plateformes et dans tous les débats, la véritable force du RHDP réside moins dans la taille des meetings que dans leur mise en scène minutieuse.
Les chorégraphies de masse, les chants rythmés et les codes vestimentaires synchronisés font adhérer à un spectacle total, où l’émotion domine la raison.
Ces dispositifs de mobilisation ne se contentent pas de rassembler ; ils stimulent le sentiment d’appartenance et produisent ce que certains analystes décrivent comme une “transe douce”, caractéristique de l’hypnose politique : un état collectif d’adhésion émotionnelle, où l’individu s’efface dans la ferveur du groupe.
Amine MEITE
Journaliste, Spécialiste en communication