Concours Sévérin Bouatini de la Nouvelle / S. Bouatini : « L’ objectif est de susciter des plumes, d’éditer de jeunes auteurs « 

 L’écrivain ivoirien Séverin Bouatini s’apprête à célébrer ses dix ans de carrière, le samedi 1er mars 2025. Cette cérémonie sera couplée avec la remise des prix de la troisième édition du concours qui porte son nom, « Séverin Bouatini de la Nouvelle« .

 

A l’ approche de l’ événement, l’écrivain a accordé un entretien à notre rédaction. Il revient sur son parcours, ses ambitions et son engagement en faveur de la jeune génération d’auteurs africains. Il évoque aussi la nécessité de promouvoir la littérature, à travers des initiatives accessibles à tous. Tout en partageant sa vision pour un avenir littéraire riche et inclusif.

Bonjour Monsieur. La rédaction de Nouvelles du Continent est heureuse de s’entretenir avec vous, ce jour.Mais avant tout échange, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Bonjour à tous. Merci pour l’occasion que vous m’offrez de m’exprimer à travers votre organe de presse. Je suis Séverin Bouatini, écrivain ivoirien. Je précise aussi que je suis un fonctionnaire, notamment Administrateur civil, en service au ministère de l’Intérieur et de la sécurité.

 

Vous avez décidé d’ initier le concours Séverin Bouatini de la nouvelle. Pouvez-vous nous en dire plus ? Qu’est-ce qui a inspiré l’institution de ce prix ?

En 2014, pour sortir mes premiers livres, ce fut la croix et la bannière. Aucune maison d’édition ne voulait de mes manuscrits. Pas parce qu’ils n’étaient pas de bonne qualité. Mais juste parce que je n’étais pas connu. Pour « Le Crime du Professeur Djounga », c’est l’ancien président de l’Association des écrivains de Côte d’Ivoire (Aeci), M. Macaire Etty, qui est intervenu auprès du patron des éditions Matrice, avant que le livre ne voie le jour. Je rappelle que c’est ce livre qui, par la suite, m’a rendu célèbre et m’a fait voyager à travers le monde.

Sept ans après le début de ma carrière, c’est-à-dire en 2022, j’ai décidé de m’investir dans le coaching, en vue d’aider les plus jeunes auteurs. L’objectif est de susciter des plumes, d’encadrer et d’éditer ces derniers. Ils sont nombreux celles et ceux qui ont du talent en écriture. Mais ils éprouvent toutes les difficultés au monde, pour s’exprimer et sortir leur premier livre. De plus, c’est une manière pour moi d’occuper sainement les jeunesses qui, dans un monde en pleine déperdition, s’adonnent parfois à des pratiques peu orthodoxes.

En outre, je veux, à travers ce projet, mettre à la disposition de notre pays et du monde des pépites en écriture. Chaque année, nous assistons à l’éclosion de dix jeunes auteurs. Dans dix ans, nous aurons, si Dieu le permet, cent potentiels écrivains. Ça sera bénéfique pour la culture de notre nation.

Pour cette compétition, vous avez choisi comme genre littéraire la Nouvelle. Pourquoi cette option ?

Pour moi, c’est un genre accessible à ceux qui font leurs premiers pas en écriture. Chacun de nous a toujours eu une petite histoire à raconter. C’est la nouvelle qui donne donc la possibilité d’écrire ce type de récits. Avec ce genre, les candidats n’ont pas besoin de s’étendre et d’écrire un livre volumineux. Avec la nouvelle, l’histoire est brève et la chute est inattendue.

Ce concours porte-t-il sur un thème ou alors les candidats sont libres de réfléchir sur la thématique de leur choix ?

Pour la première édition en 2022, nous avons laissé la latitude aux postulants d’écrire sur toutes les thématiques. Par contre, des thèmes ont été greffés à la deuxième et troisième édition. Il s’agissait de réfléchir respectivement sur les dérives en milieu scolaire et la violence faite aux femmes. L’objectif est de voir la capacité de création des candidats, en suivant une ligne à laquelle ils n’étaient pas forcement préparés.

Il est ouvert à quelle catégorie de personnes ? Quels en sont les critères et les conditions de participation ?

Le concours est ouvert à tout le monde, sans distinction d’âge, de sexe et de nationalité. D’ailleurs, on peut dire sans exagérer qu’il s’agit d’un concours international. La première édition a été remportée par un Béninois, Monsieur Malick. La deuxième édition a eu des lauréats de trois autres nationalités : Burkinabé, Béninoise et Congolaise. Le critère primordial est de savoir écrire une nouvelle, en respectant les exigences de ce genre. Pour la condition, il faut être membre du Fan Club Séverin Bouatini (Fcsb), soit avant, soit lors de la participation. Je rappelle que c’est cette organisation qui a initié et pilote le concours. Nous disposons d’une plate-forme WhatsApp (Fan Club Séverin Bouatini) et d’un numéro (+225 0585466666) d’adhésion.

Quand et comment s’est déroulée la troisième compétition? Quelles sont les récompenses prévues à cet effet ?

La compétition s’est déroulée de mai à août 2024. Et l’information était portée aux candidats via les réseaux sociaux, par affichage dans les écoles et par distribution de prospectus. Le premier lauréat va repartir avec un ordinateur portable tout neuf, d’une valeur de 200 mille francs CFA, un trophée, conçu à partir du bois bété de notre pays, un lot de livres d’une valeur de 100 mille, un tableau d’honneur et une médaille.

Les neuf autres lauréats iront avec des lots de livres, des tableaux d’honneur et des médailles. Il y a également deux prix spéciaux. celui de la ou du plus jeune lauréat.(e) et celui du ou de la lauréat (e) cinquantenaire. Le but est d’encourager les plus jeunes et les personnes de 50 ans à s’intéresser au concours. Ainsi, comme je l’ai évoqué plus haut, ce concours s’adresse vraiment à tout le monde.

Parlez-nous des objectifs à moyen et long termes de ce concours !

Comme je l’ai dit précédemment, à travers cette compétition, je veux susciter des vocations en écriture chez toute personne sensible à la chose intellectuelle. À long terme, c’est de mettre à la disposition du monde littéraire des écrivains de talent.

Pourquoi avoir choisi de coupler la remise des prix du concours avec la célébration de vos dix ans de carrière ?

Tout simplement, pour minimiser les dépenses (Rire). Mon premier livre est sorti le 02 mars 2014 au Masa, au Palais de la Culture. En 2024, cela me fait dix ans de carrière. Mon fan club et moi-même avons voulu marquer l’évènement. Dans le même temps, nous avons en charge la célébration de nos lauréats. Pourquoi ne pas jumeler les deux activités culturelles ? Je précise que cette fête devrait se tenir en 2024. Mais pour des raisons indépendantes de notre volonté, c’est en 2025 qu’elle se tient. Mais cela ne nous empêchera pas d’organiser l’édition de cette année.

Que représente pour vous cette décennie d’écriture ?

C’est le début de la maturation. En dix ans, j’ai écrit dix-neuf livres dont certains sont agréés par le ministère de l’Éducation nationale et de l’alphabétisation de notre pays. Cependant, je sais que j’ai encore du chemin à faire. En écriture comme en toute métier, on se bonifie avec le temps. Je ne suis qu’à l’aube de ce que je projette dans ma carrière d’écrivain. Mon mentor en écrire est Camara Nangala, paix à sa sublime âme. Il lui a fallu 44 années d’écriture pour sortir trente-cinq œuvres. Jusqu’à sa mort, l’homme n’a point cessé de se perfectionner à travers la lecture et les recherches. J’essaie de marcher dans ses pas. J’espère pouvoir y parvenir.

Cette double cérémonie symbolise-t-elle une transition ou une nouvelle étape dans votre parcours littéraire ?

La célébration de la décennie est, comme je viens de le souligner, la matinée de ma marche vers le chemin que je me suis tracé, vers ma vision, vers mes ambitions d’écrivain. C’est pareil pour l’évènement relatif à la récompense des lauréats de la troisième édition de notre concours. Nous ne sommes qu’au début de ce projet d’accompagnement de nouveaux créateurs de la nourriture de l’esprit.

Quel regard jetez-vous sur ces dix ans d’écriture, surtout en termes de thématiques abordées ?

En dix années, j’ai épluché un bon nombre de thèmes : les grossesses en milieu scolaire, le pardon, l’infidélité, la résilience, l’amour du travail bien fait, le respect des conseils des parents, l’amour…

Mon dernier, « Pauvre Rex », aborde la question de la protection des animaux et de l’environnement. Il y a encore beaucoup de thèmes qui titillent mon intelligence. Mes prochains livreront mes réflexions sur ceux-ci.

Quelle est votre plus grande fierté en regardant le chemin parcouru ?

C’est d’avoir écrit trois livres qui sont au programme scolaire en Côte d’Ivoire. Participer à la formation et à l’édification des élèves, et donc à la construction de l’avenir de son pays, est pour moi le plus gros trésor qu’un écrivain puisse avoir dans sa carrière. Être lu dans les écoles primaires, collèges et lycées de sa nation est la meilleure manière d’être, à jamais, graver dans la mémoire collective.

Quel rôle pensez-vous que les concours littéraires jouent aujourd’hui, dans la promotion de la littérature contemporaine ?

D’abord, ils encouragent la promotion de la lecture. Car tout bon écrivain est avant tout un grand lecteur. Ensuite, ils participent à la création littéraire et donc à la pérennisation du livre. Grâce à ces concours, le livre a encore de beaux jours devant lui.

Comment percevez-vous la scène littéraire actuelle ? Quels défis ou opportunités y voyez-vous pour les jeunes auteurs ? 

Nous avons une scène littéraire ivoirienne assez dynamique. Il y a quasiment un ou plusieurs livres qui sortent tous les mois. Des cafés littéraires sont organisés çà et là. L’engouement qu’il y a eu autour du Salon international du livre d’Abidjan (Sila) 2024 donne à croire que le nombre de lectrices et lecteurs s’accroît d’année en année. L’édition des œuvres aussi n’est, non plus, l’apanage d’un groupuscule de maisons d’édition. Ce milieu connaît également un essor extraordinaire et surtout, salutaire. Ce qui favorise la production intellectuelle. Des concours comme ceux que nous organisons donnent l’occasion à des talents en écriture d’éclore. Ce sont autant d’opportunités pour nos jeunes auteurs. Ils n’ont qu’à les saisir et les exploiter. J’avoue qu’il y a dix ans en arrière, ce n’était pas le cas.

Que souhaitez-vous que les participants et le public retiennent de cette double cérémonie ?

Que les gens retiennent que la nouvelle génération d’écrivains veut marquer, d’une tache inaltérable, le milieu de l’écriture de notre pays. Il y a des jeunes écrivains dont le leadership est tel qu’ils ne peuvent pas penser à leur seule carrière. Ils tendent la main à ceux qui veulent sortir un livre, mais qui rencontrent des écueils sur leur chemin. Ils veulent « engendrer » des disciples. C’est à ce seul prix que nous pourrons pérenniser l’art d’écrire.

Nous sommes au terme de nos échanges. Avez-vous un dernier message à faire passer ?

Oui. Je voudrais, à quelques jours de la célébration de nos deux évènements littéraires, remercier tous les membres du Comité d’organisation, pour leur totale disponibilité. À nos parrains, partenaires et mécènes, je voudrais traduire toute ma reconnaissance et ma gratitude. En réalité, leur soutien nous va droit au cœur. À l’endroit des populations d’Abidjan, plus particulièrement les amoureuses et amoureux du livre, je voudrais dire que s’il y a un évènement culturel majeur à ne pas se faire raconter, c’est bien la double cérémonie de récompense des lauréats du concours Séverin Bouatini de la Nouvelle et de la célébration des dix ans de carrière de l’auteur dont le concours porte le nom.

Je leur donne donc rendez-vous le samedi prochain, 01 mars 2025, à partir de 14 heures, au Centre national de matériels scientifiques sis à Cocody, non loin de l’Église Catholique Saint Jean.

 

Propos recueillis par Narcisse Konan


 

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